Avalanches et changement climatique

Fortement impactĂ© par le changement climatique, le risque Avalanche Ă©volue rapidement. Entre recherche et expertise, la collaboration entre les  scientifiques et les multiples acteurs de la prĂ©vention est la clĂ© de la  connaissance et de l’anticipation des risques actuels et Ă©mergents.

Que dit le GIEC
sur les avalanches ?

Connu pour ses synthĂšses internationales de rĂ©fĂ©rence (6Ăšme rapport publiĂ© le  9 aoĂ»t 2021) le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du  climat (GIEC) produit Ă©galement des « rapports spĂ©ciaux ». Celui dĂ©diĂ© aux ocĂ©ans et Ă  la cryosphĂšre (Special Report on the Ocean and Cryosphere in a  Changing Climate – SROCC), en 2019, a Ă©tĂ© le premier comportant un  chapitre spĂ©cifique sur les zones de montagne.

« Alors que les rapports du GIEC font traditionnellement la part belle aux glaciers et aux milieux polaires, ils ne disaient jusqu’ici presque rien de l’évolution des avalanches et du risque associĂ© en raison d’un manque de rĂ©sultats disponibles dĂ» Ă  la complexitĂ© du problĂšme », expose Nicolas Eckert, chercheur de l’IGE. En effet, pour dĂ©tecter des changements  passĂ©s, il est nĂ©cessaire de disposer de sĂ©ries d’observations longues et  homogĂšnes, et de les exploiter avec un arsenal statistique relativement avancĂ©.

De mĂȘme, pour apprĂ©hender les Ă©volutions futures de l’activitĂ© avalancheuse, il faut convertir les scĂ©narios d’évolution globaux du climat en scĂ©narios locaux d’évolution de la mĂ©tĂ©orologie et de l’enneigement. Cela nĂ©cessite d’utiliser des techniques complexes de changement d’échelle et de correction de biais : forçage des modĂšles rĂ©gionaux de circulation (CRM) par les modĂšles gĂ©nĂ©raux (CGM), adaptation Ă  la topographie de montagne, modĂ©lisations de l’enneigement Ă  l’aide de modĂšles physiques corrigĂ©s par l’observation. Il est alors possible d’alimenter des relations empiriques entre enneigement et activitĂ© avalancheuse Ă©tablies sur le passĂ©.

Ce rapport, auquel INRAE a contribuĂ©, conclut avec un niveau de confiance Ă©levĂ© que les alĂ©as naturels en montagne, dont les avalanches spontanĂ©es, se produiront dans le futur dans des lieux et/ou Ă  des saisons oĂč ils ne se produisaient pas jusqu’alors. Cette formulation, fruit d’un compromis scientifique et politique, sans nier la possible rĂ©duction locale de l’alĂ©a avec l’enneigement, met l’accent sur les problĂšmes potentiellement posĂ©s par l’évolution rapide dans la localisation spatiale et temporelle des phĂ©nomĂšnes dangereux. Ainsi, on s’attend Ă  davantage d’avalanches de neige humide aux altitudes Ă©levĂ©es et au cƓur de l’hiver, oĂč l’enneigement est pour l’instant prĂ©servĂ©.

Cette Ă©volution doit ĂȘtre prise en compte, par exemple, pour adapter les dimensionnements des remontĂ©es mĂ©caniques qui pourraient ĂȘtre touchĂ©es par des avalanches exerçant potentiellement de fortes pressions en pleine saison touristique.

Neige & Avalanches #182 - ANENA

Revue synthétique d'une premiÚre publication internationale
Les impacts du changement climatique sur l’activitĂ© avalancheuse et les risques associĂ©s
N. Eckert, C. Corona, F. Giacona et al.

Nature Reviews Earth & Environment

Climate change impacts on snow avalanche activity and related risks
N. Eckert, C. Corona, F. Giacona et al.

Neige & Avalanches #183 - ANENA

Bilan 2023-24 de l’EnquĂȘte Permanente sur les Avalanches
N. Eckert, H. Rowe, S. DuchĂȘne, UMR IGE, INRAE / UniversitĂ© Grenoble Alpes
P. Coquet, D. Binet, S. Roudnitska, ONF/ RTM

Prévention des Risques et adaptation aux Changements Climatiques dans les territoires de l'Espace Mont-Blanc

Les zones de montagne subissent davantage le réchauffement climatique que la moyenne européenne : on observe une intensification de ce phénomÚne ces derniÚres années ; à titre d'exemple, 2022 a été l'année la plus chaude jamais enregistrée dans les Alpes occidentales. Dans le Massif du Mont-Blanc, cela se traduit notamment par l'accélération du recul glaciaire, la fonte du permafrost, la déstabilisation des sols, ou encore la modification du cycle de l'eau, entrainant une augmentation des risques naturels et l'apparition de risques nouveaux, souvent avec des effets en cascade. PrévRisk-CC propose d'approfondir l'étude scientifique de ces risques naturels, d'organiser une vaste campagne de sensibilisation et de formation, tout en menant des actions opérationnelles de suivi et d'adaptation sur le terrain. Le projet fédÚre une communauté transfrontaliÚre d'organismes associés à l'Espace Mont-Blanc (EMB) : des Collectivités locales françaises, italiennes et suisses, des Services de secours en montagne et des Centres de recherche sur le territoire. Le projet est le premier résultat opérationnel de la prise de position des trois Vice-Présidents de l'Espace Mont-Blanc, du 05 mai 2022, validée ensuite par la Conférence frontaliÚre Mont-Blanc du 17 juin 2022, de s'engager sur l'adaptation aux effets du réchauffement climatique via une Feuille de route de l'Espace Mont Blanc : PrévRisk-CC met en application la Feuille de route pour l'adaptation aux effets du réchauffement climatique dans l'Espace Mont-Blanc, en particulier son volet consacré à la résilience face aux risques naturels. Le projet PrévRisk-CC vise à la fois :
  • Ă  donner des rĂ©ponses mĂ©thodologiques et opĂ©rationnelles pour gĂ©rer les risques naturels en montagne (haute montagne en particulier), via des approfondissements scientifiques et la mise en place d'actions pilotes de gestion des risques Ă  un niveau local ;
  • Ă  analyser les nouvelles pratiques sportives et rĂ©crĂ©atives de la montagne, Ă  l'aune des effets du rĂ©chauffement climatique (nouvelles pratiques, Ă©ventuelle sur-frĂ©quentation du Massif, nouvelles pratiques sportives...) ;
  • Ă  sensibiliser les habitants, les scolaires, les visiteurs, les randonneurs et les alpinistes sur les risques Ă©mergents en montagne liĂ©s au rĂ©chauffement climatique par une approche innovante de capitalisation des expĂ©riences acquises en 30 ans de coopĂ©ration et l'emploi de nouvelles technologies d'information et de sensibilisation (rĂ©seaux sociaux, vidĂ©os, 3D,etc.) ;
  • Ă  favoriser les Ă©changes transfrontaliers entre responsables des secours en montagne, par des exercices conjoints et la mise en valeur / promotion des Exercices du secours en montagne ;
  • Ă  intĂ©grer les professionnels de la communication dans un parcours d'approfondissement et de partage d'expĂ©riences avec les scientifiques - techniciens - secouristes ;
  • Ă  lancer des stratĂ©gies d'adaptation qui, partant d'une approche pilote locale, agissent ensuite comme levier Ă  diffĂ©rents niveaux et puissent permettre aux collectivitĂ©s locales de s'approprier d'une gouvernance efficace des enjeux.

Le projet PrĂ©vRisk-CC voit la Fondation Montagne sĂ»re intervenir en tant que Chef de file, en partenariat avec l'ARPA VallĂ©e d'Aoste, l'Association la Chamoniarde, le CNRS - EDYTEM, INRAE, la Commune de Courmayeur, la CCVCMB (CommunautĂ© de Communes de la VallĂ©e de Chamonix Mont-Blanc), le Centre Fonctionnel de la RĂ©gion Autonome VallĂ©e d'Aoste et le Canton du Valais. La contribution d’INRAE concerne spĂ©cifiquement les risques glaciaires et le dĂ©veloppement d’une mĂ©thode de prĂ©vision automatisĂ©e de l’activitĂ© avalancheuse adaptĂ©e au contexte Valdotain. Celle-ci utilise des techniques d’intelligence artĂ©rielle et est menĂ©e en miroir de dĂ©veloppements en cours dans les massifs français sur la base de l’information issue de l’EPA (lien). A termes, une approche transfrontaliĂšre est visĂ©e dont les rĂ©sultats devraient permettre d’amĂ©liorer le BERA dans les deux pays, notamment au niveau des zones frontaliĂšres.